De nombreuses sources livresques, d’internet et autres, fournissant une information quasi illimitée sur le Gwo Ka, il m’a semblé plus intéressant de répondre à l’urgence d’un premier article sur ce thème, dans une orientation plutôt introductive et personnaliste, plus vivante. Je veux juste faire une réponse assez spontanée et assez utile, d’un jeune homme interrogé dans la rue ou dans le bus, sur un élément phare de sa culture qu’il est sensé connaître moyennement.
Guadeloupéen de 42 ans, Animateur du Développement et de tous les espaces socioculturels qui me sont tombés sous les mains, voire sous les pieds, en Guadeloupe et Martinique, à Bordeaux, Paris, Montpellier et même Lyon, c’était normal… Surtout si je considère que nos discours de pauvres mortels n’ont de vérité, que la part qui nous aide à nous édifier selon notre propre prisme de l’équilibre et du bien … à clarifier, développer et cultiver, face aux handicaps accumulés dans les terres de l’enfance et du passé plus lointain à retourner.
Le Gwo ka est d’abord culture de l’écologie-ka[2] ancestrale
Herriot cite un pédagogue japonais pour qui : « la culture, c’est ce qui demeure dans l’homme, lorsqu’il a tout oublié. » et Jean LACROIX considère qu’ »une conscience cultivée est une conscience qui se situe » Ayant moi-même commencé à jouer le Gwo Ka dans la foulée de ma quête identitaire, par besoin de retrouver et ranimer des vibrations profondes à épurer (certaines paroles ridicules) et enrichir éventuellement (j’apprends la guitare et l’harmonica), les liens entre cette musique et les frustrations résultant des colonisations, du passé esclavagiste et du déracinement de je ne sais quelle terre et quel peuple d’Afrique, me semblent de plus en plus évidents, forts, tripaux, perceptibles. Mais ils ne sont pas encore assez clairs, limpides, propres et entiers, pour parfaire mon édification en Homme accompli, intégral.
C’est notamment par une bonne intégration de l’écologie-ka ancestral, véritable prophétie de la négritude, que les réminiscences du Gwo Ka me libèrent et m’élèvent face aux perversions de la colonisation. Ainsi, contrairement à beaucoup qui peinent encore à avancer dans ce long et éprouvant chemin de croix ou parcours du combattant, et même par rapport à certain qui n’ont rien d’équivalent à endurer, désormais je sens le vent et vois la lueur du bout du tunnel. Ayant ainsi cultivé mon jardin, serais-je tombé en accord avec Goethe qui a dit : « Ce que tu as reçu de tes ancêtres, acquiers-le, pour le posséder . » ?
Son origine historique est ambiguë ou multidirectionnelle
Comme beaucoup d’initiés, mon stage de Gwo Ka en 1988 avec Jean-Claude ANTOINNETTE du groupe Van Lévé, a avancé l’idée que le mot traduisait « gros quarts », ces barils d’antan de conditionnement de vin, rhum, viandes salées ou autres produits pour le stockage ou le transport notamment dans les îles, où ils étaient aussi transformés en tambours par les esclaves (début 18ème siècle) privés des troncs utilisés pour cela en Afrique.
Jacques SCHWARZ-BART indique la piste du peuple tango aux rythmes proches des nôtres, appelant ses tambours « n’goka ». D’autres précise cette origine depuis le haut Dahomey et l’Angola. Un des deux types tambour, celui donnant le son basse ou « boula » viendrait de « m’bula » nom générique de certains tambours bantous (d’où aurait dérivé la danse des esclaves haïtiens : Bamboula).
Des musicologues donneraient comme origines du Gwo Ka, les percussions et chants riches et variés de la côte ouest africaine (Golfe de Guinée, ancien royaume du Congo…), à partir desquels les esclaves originaires ont élaborés comme le créole, cet art nouveau et outil de communication.
Puisqu’on le retrouve en plus aussi bien à la Nouvelle Orléans, en Haïti, à Cuba, aux Iles Vierges et, comme en Afrique, dans tous les actes de la vie., un lien est perceptible avec le ka egyptien, évoqué avec la mort et le voyage dans l’au-delà. Ce ka, double parfait d’un défun, est à la fois son énergie vitale et selon Gérard COLBAC : « l’image-même de Dieu au fond de tout être», en particulière harmonie avec la musique qui est jouée.
Evolution de la pratique socioculturelle du Gwo ka en Guadeloupe
Dès 1640, la traite triangulaire et l’esclavage des noirs visant à satisfaire l’accroissement du besoin en Main-d’œuvre des plantations de canne à sure, conduisent de fait, à transporter les pratiquent de percussion et de chant des côtes atlantiques d’Afrique vers celles d’Amériques, et donc de la Guadeloupe. Mais ceci ne se fait pas sans une certaine perte d’authenticité de rythmes africains beaucoups plus répétitifs, vigoureux, naturels, pour les fêtes, cérémonies, veillées et combats, aux adaptations un peu plus douces, structurées, accompagnées de paroles liées aux conditions esclavagistes (métissage, créolisation).
Ce genre musical de typologie africaine, s’enrichit alors d’improvisations, de mouvements physiques en harmonie, de quasi dialogues entre soliste et choeur, et la syncope sur les temps faibles, se caractérise par une adaption aux activités-mêmes des habitations sucrières . (naissance, mort, gîte, révolte, tâches journalières, romances etc.) et sous divers styles chacun (Kannida, Konvwa, Labour etc. pour le travail ; Commandement, Veillées, Boula noir ou Toumblack pour les swarés Léwoz secrètes proches du Vaudou haïtien, du Coudomblé Brésilien, des Santeria et kumba cubaines).
Les influences (mode de vie et genre musicale) du « maître », se greffent donc à cette base, se créolise pour donner les 7 ryhmes ou danses connus : le Léwoz (guerrier, d’attaque et de plantions, danse incantatrice), le Kaladja (symbolise la lutte en amour), le Grage (production agricole : manioc, jardin , ceuillette), le Roulé qui est la valse créole pour charmer et singer le blanc, le Granjanbel ou kagenbel (danse de la coupe de cannes) ; le Toumblack. (amour, terre, danse du ventre et de la fertilité).
Les thématiques et conditions de pratique du Gwo Ka sont un peu influencées par les grands évènements historiques :
– 1848 : 3 rythmes Mindés sur 6 du pays des Congos sous contrat après l’abolition de donc la fin du marronage, symbolisant le carnaval, la fête collective ( Mendé même, mass à Kongo, mass à saint-Jean qui se joue avec des baguettes selon le défun Maître-ka Henri Délos.
– Février 1809 : nouvelle occupation de la Guadeloupe par les anglais : difficile de trouver trace de mesquineries, musiques et chants Gwo Ka animant une forme de résistance ;
– 1854, l’immigration de travailleurs indiens aux Antilles pallie la crise de main-d’œuvre consécutive à l’Abolitition esclavagiste, confrontant colombo et sucre dans le Gwo Ka ;
– Le cyclone dévastateur et meurtrier de 1865, le Service militaire en 1911, les 52000 antillais partant reprendre l’Alsace et la Lorraine aux allemands entre 1914 et 1918, puis l’autre dévastateur cyclone de 1928, donne plus de légitimité et de poids au Gwo-ka ;
– 1946, les combats d’Aimé Césaire pour une Départementalisation respectueuse de la négritude des îles de Guadeloupe et Martinique aboutissent et accentuent une politisation du Gwo-ka déjà renforcée par l’institution du premier gouverneur noir Félix EBOUE et le ralliement antillais au Général DEGAULLE contre l’Allemagne en 1939-1945.
– 1989 : Au bout de 15 années de formidable progression, le Gwo ka et la Guadeloupe sont meurtris par l’Ouragan Hugo. Deux an plus tard, leur synergie les fait bondir et de nombreux groupes de Gwo Ka se créent encore, animant de leurs vibrations musclées et mélodieuses, les espaces de plus en plus nombreux aussi que les associations, radios, comité de fêtes, syndicats d’initiatives, établissements collectivités, mettent à leur disposition en les rémunérant de mieux en mieux. C’est l’âge d’or du Gwo ka chez nous.
Une prochaine fois , nous parlerons des grandes figures de cette musique et culture à part.
[1] D’après divers concepts du ka pas ou peu traités par les dictionnaires français, notamment celui du Livre des Morts egyptien (vibration de notre équivalent spirituel) découvert par les ouvrages « Mini-Musée-Ka » et « L’Epopée du Ka—Etoile » de Gérard COLBAC (Prêtre Guadeloupéen) .
[2] D’après divers concepts du ka pas ou peu traités par les dictionnaires français, notamment celui du Livre des Morts egyptien (vibration de notre équivalent spirituel) découvert par les ouvrages « Mini-Musée-Ka » et « L’Epopée du Ka—Etoile » de Gérard COLBAC (Prêtre Guadeloupéen) .
[1] D’après divers concepts du ka pas ou peu traités par les dictionnaires français, notamment celui du Livre des Morts egyptien (vibration de notre équivalent spirituel) découvert par les ouvrages « Mini-Musée-Ka » et « L’Epopée du Ka—Etoile » de Gérard COLBAC (Prêtre Guadeloupéen) .
[1] D’après divers concepts du ka pas ou peu traités par les dictionnaires français, notamment celui du Livre des Morts egyptien (vibration de notre équivalent spirituel) découvert par les ouvrages « Mini-Musée-Ka » et « L’Epopée du Ka—Etoile » de Gérard COLBAC (Prêtre Guadeloupéen) .