Maghreb : la coopération est impérative pour gérer l’or bleu du désert du Sahara

Dans un rapport publié le 29 septembre à Genève, l’agence onusienne souligne l’urgence de prendre des mesures transfrontalières et sectorielles pour faire face aux menaces qui conduisent à la dégradation du système aquifère.

Partagé par l’Algérie, la Libye et la Tunisie, le Système aquifère du Sahara septentrional (SSAS) est la plus grande réserve d’eau souterraine d’Afrique du Nord. Cette réserve représente l’équivalent d’une surface égale à presque deux fois la superficie de la France métropolitaine et recèle plusieurs centaines, voire milliers, de mètres de profondeur.

La SSAS s’étend sur les territoires algérien, tunisien et libyen en continu de l’Atlas saharien dans le nord jusqu’au Tassili du Hoggar au Sud. Ce réservoir d’eau souterraine, parmi les plus grands du monde, assure la vie et les moyens de subsistance de 4,8 millions d’habitants. Ressource vitale en eau s’étendant sur plus d’un million de kilomètres carrés dans un environnement très aride, le système aquifère est naturellement vulnérable en raison de sa faible recharge naturelle.

Pour parer à cette vulnérabilité, le rapport de la CEE-ONU met l’accent sur l’importance d’un partenariat stratégique et d’une coopération intersectorielle et transfrontalière. Par exemple, l’une des solutions proposées consiste à accroître l’utilisation des ressources en eau non-conventionnelles en recourant au dessalement, au traitement des eaux usées et au traitement ou à la réutilisation des eaux de drainage. « Dans ce contexte, le déploiement simultané d’énergies renouvelables – l’énergie solaire en particulier – pourrait contribuer à créer des avantages majeurs pour les secteurs de l’eau et de l’énergie », a déclaré le porte-parole de la CEE-ONU, Jean Rodriguez, lors d’un point de presse virtuel depuis Genève.

Mise en œuvre de stratégies nationales et transfrontalières

Dans le cas contraire, la CEE-ONU avertit que le manque de coordination entre l’eau et l’énergie peut entraîner des résultats négatifs. Ainsi, si l’irrigation solaire à petite échelle est déployée « sans une réglementation appropriée en matière d’eau et d’environnement, les pressions exercées par l’augmentation des prélèvements d’eau augmenteraient ».

Dans ces conditions, le SSAS est perçu comme un rare exemple d’accord de coopération et d’échange de données sur un aquifère transfrontalier. Et cette évaluation a été réalisée dans le cadre de la Convention sur l’eau par la CEE-ONU, le Partenariat mondial pour l’eau en Méditerranée et l’Observatoire du Sahara et du Sahel, avec le soutien de l’Agence suédoise de coopération internationale au développement (SIDA).

À la suite d’un processus participatif de consultation avec les gouvernements et les parties prenantes locales, le rapport propose finalement un ensemble intégré de 15 solutions intersectorielles prioritaires. Celles-ci vont de la mise en œuvre de changements de gouvernance à l’adoption d’instruments économiques et politiques, en passant par l’investissement en infrastructures et l’innovation.

L’approche des « interactions » eau-énergie-alimentation-écosystèmes propose l’adoption de nouvelles technologies. Parallèlement à la relance et à la valorisation des pratiques agricoles traditionnelles, la mise en œuvre de stratégies nationales et transfrontalières est également recommandée.

Depuis les années 1970, l’Algérie, la Libye et la Tunisie ont développé une coopération en matière d’échanges d’informations et de consultations qui permett d’éclairer la gestion de l’aquifère partagé.

Pressions sur la qualité de l’eau et du sol

A l’échelle mondiale, les ressources en eaux souterraines transfrontalières ne sont généralement pas couvertes par des accords de coopération officiels, alors qu’elles constituent d’importantes sources d’eau pour la consommation humaine. Or la pression sur l’eau s’est accrue au cours des trois dernières décennies avec l’essor de la nouvelle agriculture industrielle.

Selon la CEE-ONU, le prélèvement d’eau est actuellement trois fois supérieur au taux de recharge naturel (1 milliard de mètres cubes par an). « Il en résulte des pressions sur la qualité de l’eau et du sol, ce qui conduit à un cercle vicieux de réduction de la productivité agricole et d’augmentation de la demande en énergie pour le pompage de puits profonds », a expliqué M. Rodriguez. Les écosystèmes fragiles, tels que les zones humides, sont par conséquent menacés et les populations locales sont exposées à une grande vulnérabilité.

A ce sujet, la Convention sur la protection et l’utilisation des cours d’eau transfrontières et des lacs internationaux, dont le secrétariat est assuré par la CEE-ONU, constitue, depuis son entrée en vigueur en 1996, un cadre important pour améliorer la gestion des ressources en eaux de surface et souterraines transfrontières dans la région paneuropéenne. En mars 2016, la Convention sur l’eau est devenue un cadre juridique multilatéral et intergouvernemental mondial pour la coopération sur les eaux transfrontalières, ouvert à l’adhésion de tous les États membres des Nations Unies.

SOURCE Centre d’actualités de l’ONU

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