Dans Copacabana, le réalisateur passe au scalpel les symptômes et les dérives de notre société. L’immobilier serait la « Babylone » des temps post modernes. Une religion qui broie des êtres, des destins. Pour échapper à ce labyrinthe, synonyme de compromission, négation, une seule issue pour les rebelles, en quête d’humanité : une route, Copacabana. Symbole de l’imaginaire et de la résistance.
Qu’on ne s’y trompe pas !
Copacabana, le dernier film de Marc Fitoussi est loin d’être un hymne aux tropiques.
Névrosés du cocotier, s’abstenir. Même si quelques danseuses galbées, en guise d’apothéose, encerclent Isabelle Huppert alias Babou.
Retrouvailles entre une mère et sa fille (Lolita Chamah), plus que la fièvre de la samba.
C’est l’objet du film.
Comme Brazil, Copacabana est un faux ami
Au bout de quelques instants, le spectateur, engoncé dans son fauteuil, comprend l’ellipse ou l’astuce commerciale.
Ici, pas de plage à l’horizon, pas de carioca, pas de capoeira.
En revanche, du béton, des galeries commerciales désertes, une femme (Isabelle Huppert,) un tantinet exubérante, addict des vitrines et des salons de coiffure.
En un mot : l’ennui.
Voilà pour les premières images. Pour peu, on filerait à l’anglaise.
Puis Ostende, le tournant. Une ville où le froid conditionne les relations sociales, l’amitié et les trajectoires.
Marc Fitoussi, après La Vie d’artiste, décrit le capitalisme et ses effets pervers au long court.
Pour atteindre son but, il jette son dévolu sur Babou, une marginale dont la vie exaspère sa fille, plus attirée par le conformisme et la réussite que par les appels d’air du libertarisme new age.
Au chômage, egocentrique, caractérielle, sans mari, ni attache
De prime abord, l’héroïne a tout pour agacer l’idéologie ambiante, ses dogmes.
Incapable de se remettre en question, « looser » devant l’éternel, sa vie ressemble à un vide avec l’alcool et le sexe comme échappatoire en prime time.
Puis, lentement, on entre dans son univers. On découvre une femme complexe, fragile, double, qui pour affronter un monde impitoyable et sans rêve, n’a d’autre arme que la révolte, les frasques, la dérision.
Quête de soi, zèle, lutte pour la vie, A La recherche du temps perdu ou éloge de l’instant
Tels sont les thèmes que le réalisateur convoque pêle-mêle pour le bonheur des contempteurs du système.
Des marronniers, certes ! Mais ô combien réalistes.
Une société aliénée par le travail, des salariés exploités. Floués, obsédés par le chiffre au point d’oublier leur humanité jusqu’à sacraliser dans leur logement de fonction Hobbes et son Léviathan : « L’homme est un loup pour l’homme ».
Des individus noyés dans l’immobilier – expression symptomatique de notre société et de ses excès – pour qui l’empathie, le naturel sont une faiblesse, voire une tare.
C’est encore le sempiternel refrain d’un monde déshumanisé où la finance fixe les règles du vivre ensemble.
« Rien de nouveau sous le soleil », dirait l’autre.
Paul Moffen (Afiavimag)