Le Réseau mondial contre les crises alimentaires a organisé aujourd’hui une manifestation de haut niveau pour faire le point sur les dernières données mondiales disponibles au sujet des retombées de la pandémie du COVID-19 et de leur effet aggravant sur la faim aiguë dans les pays vulnérables qui étaient déjà ravagés par une crise alimentaire avant même l’arrivée du nouveau coronavirus. Cette réunion était également une occasion importante, pour les partenaires fournisseurs de ressources internationaux et d’autres parties intéressées, de discuter des nouvelles priorités et des aspects liés aux financements et aux programmes compte tenu de la situation liée au COVID-19.
Des informations récentes sur la République démocratique du Congo, par exemple, indiquent que ce pays d’Afrique centrale est maintenant aux prises avec la pire crise alimentaire à l’échelle mondiale au point de vue du nombre absolu de personnes vivant en situation d’insécurité alimentaire grave – pas moins de 21,8 millions de personnes -, dans un contexte où les conséquences des mesures adoptées pour faire face au COVID-19 ont aggravé les déterminants de la faim qui existaient déjà dans le pays: insécurité et conflits armés; ralentissement économique prolongé; fortes pluies et inondations.
M. Qu Dongyu, Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, a fait savoir aux participants à la manifestation, qui s’est tenue en marge de l’Assemblée générale des Nations Unies, qu’il fallait absolument agir de concert avant que la situation ne se détériore en privilégiant les systèmes et les mesures de prévention et d’alerte rapide.
M. Qu Dongyu a également souligné l’importance que revêtent la collecte de données et la différenciation entre les pays, qui sont le fondement de l’Initiative Main dans la main que la FAO a mis sur pied pour établir des partenariats entre les pays développés et ceux qui ont le plus besoin d’assistance en vue d’accélérer la transformation des systèmes agroalimentaires et le développement rural durable. Le Directeur général a indiqué que la Plateforme géospatiale de l’Initiative Main dans la main venait d’être mise en service pour faciliter la collecte des données.
Afin d’aider les pays et les agriculteurs à gérer les difficultés chroniques liées à l’alimentation et à l’agriculture et de reconstruire en mieux au lendemain de la pandémie, l’Organisation a également créé le Programme d’intervention et de redressement de la FAO dans le contexte du COVID-19, qui a pour finalité d’atténuer les effets directs de la pandémie tout en améliorant la résilience des systèmes alimentaires et des moyens d’existence à long terme. Venir en aide aux plus vulnérables en favorisant l’inclusion économique et la protection sociale et renforcer les capacités d’adaptation des petits exploitants sont parmi les principales priorités du programme.
Mark Lowcock, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence de l’ONU, a également pris la parole pour signaler que le monde n’avait pas connu de crise alimentaire aussi grave depuis 50 ans, mais qu’il n’était pas trop tard pour agir et empêcher la faim aiguë de devenir un problème persistant.
Janez Lenarčič, Commissaire européen à la gestion des crises, et Jutta Urpilainen, Commissaire européenne chargée des partenariats internationaux, ont préconisé une meilleure coordination entre les acteurs humanitaires et les acteurs du développement et affirmé que l’Union européenne était résolue à consolider le Réseau mondial contre les crises alimentaires.
Nick Dyer, Envoyé spécial du Royaume-Uni pour la prévention contre la famine et les affaires humanitaires, Jenny McGee, Administratrice adjointe chargée des secours, des interventions et de la résilience au sein de l’Agence des États-Unis pour le développement international, Peter Eriksson, Ministre suédois de la coopération pour le développement international, Djimé Adoum, Secrétaire exécutif du Comité permanent inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel, Valerie Guarneri, Sous-Directrice exécutive du Programme alimentaire mondial, et Susanna Moorehead, Présidente du Comité d’aide au développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques, comptaient également parmi les participants qui sont intervenus aujourd’hui.
Des zones sensibles toujours plus à risque face à la faim
D’après un rapport de synthèse présenté aujourd’hui par le Réseau mondial, en dehors de la République démocratique du Congo, c’est au Burkina Faso – où le nombre de personnes souffrant de faim aiguë a augmenté de près de 300 pour cent depuis le début de 2020 -, au Nigéria, en Somalie et au Soudan que la situation de la faim aiguë s’est le plus dégradée ces derniers mois. Le rapport présente des informations actualisées sur les 55 pays qui étaient déjà confrontés à une crise alimentaire à la fin de l’année 2019 et qui avaient été répertoriés par le Réseau dans un rapport publié au début de 2020. Des hausses importantes du nombre global de personnes souffrant de faim aiguë ont été observées au nord du Nigéria (8,7 millions de personnes au total, soit une augmentation de 73 pour cent), en Somalie (3,5 millions de personnes, soit une augmentation de 67 pour cent), et au Soudan (9,6 millions de personnes – près d’un quart de la population du pays-, soit une augmentation de 64 pour cent).
S’agissant de la prévalence de l’insécurité alimentaire aiguë au sein de la population nationale, quatre pays (le Honduras, le Lesotho, la République centrafricaine et la Somalie) ont vu la proportion de leur population touchée par la faim aiguë augmenter de plus de 10 points de pourcentage. En République centrafricaine, par exemple, l’insécurité alimentaire est telle que la moitié de la population a besoin d’aide de toute urgence.
Le rapport indique que la situation se détériore également en Eswatini, à Haïti et au Honduras.
Les participants ont affirmé avec insistance que les tendances observées faisaient ressortir non seulement l’importance qu’il y a à poursuivre l’aide humanitaire pour répondre aux besoins constatés, mais aussi la nécessité absolue, à plus long terme, de bâtir des systèmes alimentaires plus résilients.
Le Réseau mondial contre les crises alimentaires a vu le jour en 2016 grâce à une initiative de l’Union européenne, de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et du Programme alimentaire mondial (PAM). Il a pour but de mieux relier, intégrer et orienter les initiatives, les partenariats, les programmes et les processus d’élaboration de politiques en cours pour tenter d’apporter des solutions durables aux causes profondes des crises alimentaires.
L’insécurité alimentaire (ou la faim) aiguë décrit une situation dans laquelle la vie ou les moyens d’existence d’une personne sont directement menacés parce que cette dernière n’a pas accès à une alimentation adéquate. Ce paramètre s’appuie sur des mesures de la faim extrême convenues au niveau international, telles que le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) et le Cadre harmonisé. Des crises soudaines peuvent rapidement amener des populations à souffrir de faim aiguë. La faim chronique est quant à elle un autre paramètre, sur lequel le rapport sur L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde fait le point chaque année. Elle désigne une situation dans laquelle un individu n’est pas en mesure de se nourrir suffisamment pendant une période prolongée pour avoir un mode de vie normal et actif.
SOURCE Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO)