Témoignage émouvant d’un enfant à sa mère
Avec son joli nez bien droit hérité de ses origines afro-brésilienne, son sourire ravageur, fait
de ses fines lèvres et orné de belles et imposantes dents. Vous trouverez souvent Lydie entrain
de rire aux éclats! Son rire aussi radieux que contagieux s’entend à des kilomètre à la ronde!
Portrait d’une femme haute en couleurs.
Issue d’une fratrie de neuf, elle naquit à Cotonou en été 1969. Lydie vécu à la Haie-Vive toute son enfance et son adolescence. Ce petit quartier résidentiel qui l’a vu grandir lui a donné certaines armes pour affronter son futur. Elle a su user de ses acquis pour traverser tous les obstacles que la vie lui réservait. Arrivée en France à ses dix-huit ans, avec un de ses frères, elle n’a cessé de se battre pour sa liberté d’agir. Elle est une femme émancipée depuis toujours. Elle ne vit et travaille que pour sa paix et celle de ses enfants. Ses mains ont l’air fatiguées non pas du travail qu’elles ont du accomplir au fil tu temps, mais plus des lavages de mains répétitifs causés par ses tocs. Ces derniers déclenchés par tous les traumatismes dû aux attaques et micro-agressions racistes qu’elle subit au quotidien. Les passants, le voisinage et les inconnus dans le tram eux, ne voient qu’un petit bout de femme noire d’un mètre cinquante-deux, dynamique à la démarche déterminée. Depuis 2004, elle travaille au Musée d’Aquitaine en tant que secrétaire. Musée historique de Bordeaux, ses expositions traitent souvent de l’esclavage, pourtant, il est le témoin silencieux d’une administration profondément raciste et remplie de préjugés qui persécute Lydie depuis des années. Malgré cela, elle ne cesse de riposter et de se battre. Et c’est souvent ce qu’on lui reproche : ne pas sombrer sans
arrêter de se battre. Ses meilleures armes sont le rire et la bonne humeur. Lolès, sa cheffe de service la décrit comme étant une femme avec un fort caractère, battante et avec les idées très claires. Mais elle est surtout quelqu’un avec un grand cœur, qui adore ses filles et ferait tout pour elles. Elle peut être dure et au même temps, la plus gentille des personnes que l’on peut côtoyer. Pour Caroline qui côtoie Lydie depuis plusieurs année, elle est à son sens une personne courageuse, généreuse, qui a le don de sois, elle a souvent fait preuve de bonté et d’altruisme. De tempérament joyeux, elle communique sa joie de vivre et donne souvent des conseils avisés. Franche, elle peut parfois s’emporter de manière excessive et laisser son interlocuteur décontenancé. Lydie même si elle ne
pense pas l’être particulièrement, est très généreuse. Elle donne sans cesse. Que ce soit de l’argent, de son temps ou de son amour, elle fait tout pour être présente pour autrui.
L’histoire qui l’a marquée…
Par amour elle quitte Bordeaux pour Dakar en 1996. Isolée de sa famille et de ses amis, elle s’attache à quelques unes de ses voisines. Puis très vite, elle conquît la cité BCEAO. Au fil du temps elle s’adapte… Malheureusement, son idylle dakaroise prit brutalement fin. Elle décida alors de rentrer à Bordeaux pour le bien être de ses enfants. Ayant pris une disponibilité à la mairie de Bordeaux pour qui elle travaillait, elle pensait retrouver son emploi facilement. Mais cela ne fut pas le cas… Prétextant un « manque de poste à pourvoir », la mairie refusa de la réintégrer et ce, malgré son devoir de le faire. Abandonnée, elle resta en disponibilité pendant un long moment. Ne sachant pas quoi faire, elle se rendait tous les midis à l’église dominicaine de son quartier qu’elle trouvait chaleureuse. Pleine d’espoir, elle fit la promesse à la vierge Marie d’aller la remercier à Lourdes lorsqu’elle serait réintégrée. Heureusement,
le 24 août 2004 Lydie fut réintégrée au sein de la mairie de Bordeaux. En effet, aussi déterminée qu’elle l’était, elle intenta un procès à son employeur à la vue de l’injustice qu’elle subissait. Chose promise étant due, elle se rendit à Lourdes le 15 août 2005 avec ses deux filles alors âgées de cinq et huit ans. Lors du pèlerinage de l’ascension, plongées dans cette foule immense ainsi que dans l’allégresse de la foi catholique, elle remercia la vierge Marie comme promis. Mais dans la foule, une dame d’un certain âge, semblait les suivre… Écoutant sa voix intérieur, elle se retourna et reconnue la même dame. Celle-ci s’approchât sur le Pont-vieux de Lourdes et dit : « Venir à Lourdes, avec ses enfants, c’est bien. ». Elle ouvra sa main et dans sa paume se trouvaient trois médailles miraculeuses parfaitement disposées dans un mouchoir blanc. Elle dit ensuite : « Prenez, allez dans cette boutique pour acheter des chaînes. » , puis elle disparut. Sans se poser trop de questions, elle alla acheter ces chaînes et perdit tout intérêt pour cet objet… Sans arrêt persécutée au Musée d’Aquitaine à cause de sa couleur de peau et de son audace, vient un jour où cette même voix lui vint et lui dit de porter cette médaille pour laquelle elle avait perdu tout intérêt… Quelques jours plus tard elle fit des recherches sur internet et de part et d’autres. Elle retourna alors dans
l’église dominicaine où elle se sentait si bien pour parler de son bijou. Le prêtre lui révéla qu’elle avait sans doute assisté à une « apparition privée » de la vierge Marie. Il lui conseilla de ne pas en parler. Mais c’est mal connaître cette femme qui aime tant partager. Son histoire elle l’a raconte fidèlement avec une foi et une passion débordantes depuis douze ans. Thomasia, sa fille aînée dit même qu’elle utilise les mêmes mots à chaque fois, sans faute. En 2006, Lydie gagna son procès : on lui rendit enfin justice. Cette histoire qu’elle porte avec fierté, l’aide chaque jour à avancer et à ne pas baisser les bras. Car les défis et combats qui incombent une femme noire dans une société
faite par et pour des hommes blancs sont tout sauf facilement surmontables. Elle rêve souvent de tout laisser et de se réinstaller chez elle au Bénin afin de pouvoir siroter de bons cocktails au bord de la plage de sa ville d’origine : Ouidah et d’avoir moins de tracas au quotidien…
Par Leslie Kiniffo pour ISICA NEWS
Lydie da Trinidade aux cotés de Chaban Delmas
et Jean-Louis Froment 1994.©Yves Reynier