Jacob Dévarieux

 

( Le 30 juillet 2021, Nous apprenions le décès de Jacob Devarieux, co-fondateur du groupe Kassav’.

L’artiste, qui avec sa guitare, nous a donné tant de joie au cour de ces quarante dernières années. )

 

AFIAVI : On commençait à vous ranger dans le placard des bons souvenirs et voila que la célébration de vos 30 ans déclenche un véritable raz de marée sur les trois continents. Quelle impression cela vous laisse-t-il ?

Jacob Dévarieux (KASSAV) : On dirait bien que ceux qui ont voulu nous enterrer un peu vite se sont trompés dans leur analyse…

Pourquoi avoir choisi Abidjan comme départ de la célébration ? Y a-t-il un lien avec les débuts de Kassav, plébiscité par les Africains avant tout le monde ?

Abidjan a été la première ville ou Kassav’ a joué en Afrique. De plus, nous y avons rencontré un succès phénoménal qui a contaminé toute l’Afrique puis le reste du monde.
Il y a donc une histoire d’amour entre Kassav’ et l’Afrique ? Pouvez-vous nous en parler ?

Il faudrait écrire un livre de plusieurs tomes pour cela, mais en deux mots j’ai appris à jouer de la guitare au Sénégal pendant mon adolescence. J’y ‘ai enregistré en tant que musicien, arrangeur ou ingénieur du son et cela avec beaucoup d’artistes africains. C’est une très grande partie de ma vie.

Vous avez vécu au Sénégal ? Y avez-vous joué et combien de temps ?

J’y ai vécu deux années. Adama Faye, le grand frère d’Habib (le bassiste de Youssou N’dour), m’y a appris à jouer de la guitare puis je suis parti en Europe. J’ai fais mon retour une vingtaine d’années plus tard en concert avec Kassav’.

On aimerait avoir l’avis du producteur, compositeur et connaisseur que vous êtes sur :
* La traversée du désert que vit la musique congolaise depuis quelques années :

Vous parlez de traversée du désert?… Koffi Olomidé a rempli le Zénith (6500 places) puis Bercy (17000 places) ! Qui peut dire mieux?!

* Le phénomène du Coupé décalé ivoirien né à Paris :

Paris est aussi la ville ou le coupé décalé marche le plus. C’est la ville numéro 1 qui est au top national avec notamment le groupe Magic System, Mokobé pour ne citer qu’eux.
On constate que beaucoup d’artistes africains se sont appropriés le Zouk au point d’en faire une des offres musicales les plus prolifiques sur le marché musical africain, pollué de nos jours par la piraterie. Kassav’ envisage-t-il des nouvelles pistes de travail concernant le Zouk avec certains de ces artistes, notamment lusophones ?

Nous trouvons leur travail intéressant, mais comme tous les artistes africains, ils sont très durement pénalisés par cette piraterie. Cela nous refroidit un peu.

Trente ans après, quel regard portez-vous sur la musique antillaise que vous avez portée très haut ? Peut-on imaginer que cette musique puisse enfin voler de ses propres ailes et ce indépendamment des médias et des maisons de production de la Métropole ?

L’évolution est la même pour toutes les musiques aussi bien concernant les générations montantes. L’image semble plus importante que le son. La musique antillaise a plusieurs têtes d’affiche à son actif. Mais pour ce qui est de s’affranchir des moyens de distributions et des medias, c’est encore un peu tôt.

On sait que les médias français sont restés longtemps en retrait devant l’évidence du phénomène Kassav. Comment ont évolué vos relations avec ces derniers ?

Le 16 mai 2009 nous avons rempli le Stade de France en réunissant plus de 70 000 personnes. Ce chiffre est exceptionnel quand on sait que nous ne sommes passés sur aucun des grands médias nationaux. Concernant ces relations, nous avons cependant bon espoir qu’elles évoluent dans le bon sens…
Comment voyez-vous l’avenir avec les vagues du Ragga, du Rn’b et du Coupé décalé vers lesquels se tourne la jeunesse noire ?

Je leurs souhaite un avenir radieux et que ces musiques soient encore présentes dans trente ans.

Quelle lecture portez-vous sur le mouvement social qui a secoué les DOM TOM ?

Ce n’était que prévisible. J’espère cependant que cela fera bouger les choses dans l’avenir.

AFIAVIMAG

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